Par Danièle OBONO, députée de Paris, membre du groupe parlementaire de La France insoumise à l’Assemblée nationale
Je suis (et fière d’être) membre, militante, élue de La France insoumise, un mouvement révolutionnaire, éco-socialiste, laïque et antiraciste. Qui ne défend pas “le droit d’être islamophobe”.
L’islamophobie, telle que définie aujourd’hui par la grande majorité des personnes concernées, des institutions nationales et internationales, des scientifiques, etc., désigne le racisme envers les personnes de confession musulmane, réelle ou supposée et/ou de leur religion, l’Islam. C’est ainsi que j’emploie, moi aussi, ce terme pour désigner une oppression raciste que je combats. Mais ce n’est pas ainsi que l’entendent une partie de mes camarades qui combattent, pourtant, le même système d’oppression. Malgré cela, nous défendons, ensemble, la liberté de conscience et de culte, le droit au débat, à la critique des religions et l’égalité des droits. Nous combattons, ensemble, avec fermeté et détermination, toutes les formes, actes, propos racistes et discriminants. Et nous dénonçons, ensemble, toutes les instrumentalisations et déformations de la laïcité à des fins racistes et stigmatisantes, ainsi que toute instrumentalisation de la religion à des fins politiques.
Nous l’avons écrit ensemble dans notre programme et nos livrets. Nous l’avons débattu dans quelques unes de nos initiatives. Nous le mettons en pratique au quotidien, dans les luttes et dans les institutions.
C’est une question de principes, de valeurs, et même, pour quelques un·es d’entre nous, une question tout simplement de survie, mentale, émotionnelle et physique. C’est aussi une question de stratégie. Fédérer le “peuple” ne signifie pas fondre un peuple abstrait, imaginaire dans un moule parfait qui ressemblerait à ce à quoi on s’imagine qu’il doit ressembler (ce qui signifie souvent à nous-mêmes). Fédérer le peuple, pour moi, nécessite de fédérer toutes les couleurs, variétés, diversités, énergies du peuple dans une dynamique d’alliances qui, plutôt que d’effacer ce qui fait de nous des êtres singuliers et multiples, se nourrit de toutes nos identités et des ressorts de luttes, de résistance, de créativité et d’émancipation individuelle et collective qu’elles produisent.
Mais pour réussir cela, il ne suffit pas d’énoncer ces principes, théoriquement, abstraitement. Il faut les faire vivre. Il faut parfois, pour certain·es, se rendre compte d’où elles et ils pensent et parlent, et apprendre à se taire, à juste écouter, entendre, apprendre, comprendre. Cela ne signifie pas qu’on sera aussitôt ou au final d’accord sur ou convaincu·e par tout. Mais c’est une des conditions pour pouvoir vraiment débattre, et le faire avec respect et bienveillance, y compris de nos désaccords. Pour pouvoir agir ensemble et construire des ponts, des alliances, des possibles avenirs en commun.
Alors oui, discutons, apprenons, agissons.