Aucun cap, aucune ambition politique, des budgets en berne… et aucun ministre pour les quartiers populaires. Sur 41 membres du nouveau gouvernement, la politique de la ville n’apparaît nulle part. Pas même un mot du Premier ministre pour les habitant·es des quartiers populaires lors de son discours de politique générale. Il ne peut pas s’agir d’une simple omission. C’est une volonté. Un choix qui laisse tous les acteurs de la politique de la ville choqués.
Parfois qualifiés de voyous, de racailles, voire animalisés par l’extrême droite et la droite qui parlent d’ensauvagement d’une partie de la société, les habitant·es des quartiers populaires n’ont cessé d’être stigmatisés ces dernières années. Ils sont maintenant ignorés.
Plusieurs alertes ont pourtant été lancées : par les habitant·es, par les associations ou par les élu·es. Et trop de drames se sont produits. A la suite des révoltes urbaines de l’été 2023 ayant fait suite à la mort de Nahel Merzouk, la seule réponse du gouvernement a été répressive et autoritaire, ignorant totalement la demande de justice et d’égalité qui s’exprimait alors. L’ordre républicain au lieu de la promesse républicaine. Mais force est de constater qu’aujourd’hui, la République est loin de «donner à chaque jeune les mêmes chances de réussir, quel que soit son lieu de naissance, son nom ou son milieu social», à rebours des engagements du président de la République.
Le désengagement de l’Etat pour la politique de la ville
Dans ce contexte de mépris, et alors que les inégalités sociales et environnementales s’accentuent et frappent de plein fouet les plus fragiles, le silence du gouvernement est assourdissant. En ne désignant pas de ministre pour s’occuper de ces enjeux cruciaux, le message est clair : les habitant·es des quartiers populaires sont secondaires.
Une tendance qui s’inscrit dans la durée. Le désengagement de l’Etat pour la politique de la ville étant à l’œuvre depuis 2017, avec le détricotage des services publics et une baisse continue du soutien aux associations et structures qui agissent chaque jour sur le terrain. Face à cette situation, les élu·es locaux et le monde associatif sont restés mobilisés, portant à bout de bras une action publique forte, indispensable dans les quartiers populaires. Mais l’inquiétude est immense actuellement. La composition du gouvernement est loin de représenter le vote des quartiers populaires, abîmant un peu plus la démocratie. Les budgets sont encore annoncés à la baisse, les emplois adultes-relais sont gelés ou supprimés, l’horizon semble encore s’assombrir pour les plus fragiles d’entre nous.
Monsieur le Président, monsieur le Premier ministre, les habitant·es des quartiers populaires méritent notre attention et notre solidarité nationale. L’égalité des devoirs mais aussi l’égalité des droits doivent tout autant exister pour tous et toutes partout sur nos territoires. Soyons fidèles à notre devise nationale. Il est temps de prendre la mesure de l’urgence sociale qui se joue dans les quartiers. Les élus locaux, les associations, les habitant·es ont besoin d’un soutien clair et affirmé.
Publiée le 3 octobre dans Libération
Signataires
Mélody Tonolli Adjointe à la maire de Paris en charge des quartiers populaires Olivier Faure Premier secrétaire du PS Marine Tondelier Secrétaire nationale Les Ecologistes – EE-LV Fabien Roussel Secrétaire National du PCF Lucie Castets Candidate du Nouveau Front Populaire au poste de Première ministre Eric Coquerel Député de Seine-Saint-Denis Clémentine Autain Députée de Seine-Saint-Denis Ian Brossat Sénateur Daniele Obono Députée de Paris François Ruffin Député de Picardie Fatiha Keloua-Hachi Députée de Seine-Saint-Denis Emmanuel Grégoire Député de Paris Danielle Simonnet Députée de Paris Stéphane Troussel Président du département de Seine Saint Denis Léa Balage El Mariky Députée de Paris Ali Rabeh Maire de Trappes Colombe Brossel Sénatrice Eric Piolle Maire de Grenoble Sabrina Sebaihi Députée des Hauts-de-Seine Yannick Jadot Sénateur